Anne Baquet
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Remords de Vieille Dame

Anne Baquet


Je m'en suis tant voulu de n'ĂȘtre point Ă  vous
J'aurais dĂ» succomber et vous ĂȘtre soumise
Et ne point vous défendre la rose sous ma chemise
Puisque me voilĂ  vieille, voilĂ , je vous dis tout.
D'abord je vous aimais, mais j'Ă©tais dans le noir
Comme bĂȘte peureuse, tenue Ă  me dĂ©fendre
Ah, plutÎt me tuer qu'à vous céder mon ventre
Et je vous ai lassé de ne plus vous revoir
Vos lettres, vos billets, tournés en madrigaux
Je les ai tous subis portés par ma cousine
Je les cachais enfouis dedans ma limousine
Entre des rubans neufs et monsieur Marivaux.

Quand on m'a marié à ce nigaud d'Emile
Qui a forcé ma porte à peine passé l'anneau
Et que j'ai dĂ» subir, premier, dernier bourreau
Ah, je vous ai cherché dans les salons en ville
Vous Ă©tiez en province ou bien en Angleterre
A mon premier enfant, je crois Ă  Amsterdam
A ma seconde fille, faisant jouer des drames
Et puis devenue veuve suis tombée en priÚre
Que cette vie fut sotte, ainsi sans grand amour
Mes traits se sont fanés, mes dents se sont pourries
J'ai attrapé hélas vilaines maladies
Le seigneur m'a punie pou le restant des jours

Ah, j'aurais dĂ» vous suivre mĂȘme voleurs traquĂ©s
Et vous m'auriez aimée entre selle et auberge
Et sur l'herbe des bois ou des greniers superbes
Quand c'est temps de mourir, tout est Ă  regretter
Les seins si peu offerts, la bouche si peu prise
Les reins si peu tendus, le plaisir silencieux
Je m'en suis tant voulu de n'ĂȘtre point Ă  vous
J'aurais dĂ» succomber et vous ĂȘtre soumise
J'aurais dĂ» succomber et vous ĂȘtre soumise

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