L'habitant du château Depuis belle lurette N'a plus pointé la tête Dans les couloirs d'en haut De ses chambres d'amis N'a plus poussé la porte Le diable les emporte Les amis sont enfuis
Ne reçoit plus beaucoup Les sentiments Sont fatigants Dans sa bouche la langue se noue
L'habitant du château A oublié la salle Où se tenaient les bals Dessous les lustres hauts Sur les parquets cirés La poussière se pose Les meubles en bois de rose Finissent démembrés
Ne festoie plus beaucoup Genoux cagneux Dos plein de nœuds Pour chanter sa gorge s'enroue
L'habitant du château Répudie la cuisine Ignore les bassines Néglige les fourneaux Les souris font leurs nids Dans les placards qui baillent Laissant les victuailles Se répandre en tapis
Ne mange plus beaucoup Trouve trop dure La nourriture Et puis finalement s'en fout
L'habitant du château Ne connaît plus la pièce Où les autres s'empressent De gaspiller de l'eau Des toiles d'araignée Décorent la baignoire Et les cafards vont boire Au lavabo rouillé
Se lave plus beaucoup Serviettes lourdes Et savon fourbe Ont rendu la douche tabou
L'habitant du château A condamné la chambre Où des ombres trop tendres Ont troublé son repos Les armoires fermées Retiennent leurs fantômes Et meurent les arômes Dans le lit déserté
Il ne dort plus beaucoup Juste somnole Alors s'affole Au réveil sa mémoire floue Mais dans le ventre chaud De sa bibliothèque Enroulé bien au sec
L'habitant du château Dévide tout le fil De son imaginaire Il voit grande lumière Et son rêve est fertile
S'il ne bouge plus beaucoup Quelle importance Car c'est l'essence De sa vie qui le tient debout
S'il ne vit plus beaucoup En apparence Faites confiance Une flamme brûle en dessous