C'était en quatorze cent trente Le vicomte de Malmouché Allait retrouver son amante, La femme du chef des Archers. Enveloppé d'une sombre cape Le long des murs, il se glissait Se disant "Il faut que j'échappe A la surveillance du guet, Pour éviter l' mari jaloux Glissons-nous donc à pas de loup"
A ce moment Les Archers du Roy Quatre par quatre Passèrent trois par trois Criant en bran- -dissant leurs hallebardes "Malheur aux cu- -rieux qui nous regardent !"
Alors le vicomte Claquant les dents S'enfuit encore plus silencieusement Silencieusement, silencieusement
Il arriva près de sa blonde Qui avait les cheveux châtains Elle lui dit "Mon mari fait sa ronde On va pouvoir s'aimer un brin" Pendant une heure, ils s'enlacèrent De joie, ils se mordaient l' croupion Puis, le vicomte lui dit "Ma chère Ça m' donne faim, il faut s' taper le tronc A table !" dit-il "sans retard Donne-moi le cervelas et l' pinard"
A ce moment Les Archers du Roy Quatre par six Passèrent trois par trois Le vicomte dit "Faut pas t'en faire, ma p'tite J'aime ton cha- - teaubriand aux pommes frites Je tire un cou- - teau en cas d'événement Soupons, soupons silencieusement Silencieusement, silencieusement
Mais, v'là que la ronde s'arrête Et le chef des archers du Roy S'écria en levant la tête "Il y a un gigolo chez moi !" A c' moment, c'était l' plus étrange Sa femme disait à mi-voix "Je vous jure, vicomte, mon cher ange, Qu'elle est beaucoup trop grosse pour moi" Elle parlait d'une tranche de jambon, Qu'il n'y ait pas de confusions. Ah ! non
A ce moment Les Archers du Roy Quatre par neuf Passèrent trois par trois Le pauvre mari cria "C'est trop infâme ! Il y a un mec- -réant près de ma femme En train d' baiser Son petit cou d'enfant Arrêtons-les silencieusement Silencieusement, silencieusement
Les archers dans l'ombre glissèrent Mais le vicomte les aperçut Alors, il saisit sa rapière en criant "Ah cré, v'là l' cocu !" La femme, affolée de détresse Disait "Fuyons vite ce logis !" Mais le vicomte aussi vite reprit "Belle gonzesse, tu me cours sur le bigoudi !" Ouvrant la f'nêtre en tapinois Tous deux s'enfuirent par les toits
A ce moment Les Archers du Roy Quatre par douze Fondirent trois par trois. Tous s'écrièrent Ne voyant plus leurs traces, "Nous sommes des con- -certés par tant d'audace !" Et comme faut qu'u- -ne histoire ait un dénouement Ils partirent définitivement Définitivement Et comme dans ce roman Je m'en vais également Silencieusement.