C'est pour pouvoir enfin botter les fesses A ces vieillards qui nous ont dit Que nos vingt ans, que notre jeunesse Étaient le plus beau temps de la vie C'est pour pouvoir enfin botter le cÂœur A ceux qui nous volent nos nuits Ces maladroits qui n'ont que leur ardeur Croulants qui n'ont que leur ennui
C'est pour cela, jeunes gens, Qu'au fond de moi s'éveille Le désir charmant De devenir vieille
C'est pour pouvoir un jour enfin leur dire A celles qui me jugent avec fureur "Pauvres grognasses" c'est pour pouvoir vous dire "Je vous pardonne votre laideur" C'est pour pouvoir leur dire à ces matrones Qui mille fois m'ont condamnée "Comment voulez-vous que l'on vous pardonne Vous qui n'avez même pas péché ?"
C'est pour cela, jeunes gens, Qu'au fond de moi s'éveille Le désir charmant De devenir vieille
C'est pour pouvoir, au jardin de mon cÂœur, Ne soigner que mes souvenirs Vienne le temps où femme peut s'attendrir Et ne plus jalouser les fleurs C'est pour pouvoir enfin chanter l'amour Sur la cithare de la tendresse Et pour qu'enfin on me fasse la cour Pour d'autres causes que mes fesses
C'est pour cela, jeunes gens, Qu'au fond de moi s'éveille Le désir charmant De devenir vieille
C'est pour pouvoir un jour oser lui dire Que je n'ai bu qu'à sa santé Que quand j'ai ri c'était de le voir rire Que j'étais seule quand j'ai pleuré C'est pour pouvoir enfin oser lui dire Un soir, en filant de la laine Qu'en le trompant mais ça, oserai-je le dire, Je me suis bien trompée moi-même
C'est pour cela, jeunes gens, Qu'au fond de moi s'éveille Le désir charmant De devenir vieille