J'ai rencontré souvent Dans l'épaisseur des villes Des types comme toi Errants sous les néons Des fugueurs de partout D'Asnieres ou de Belleville Qui cherchent dieu sait quoi Et ne sont qu'un prénom Ils marchent sur un fil Familiers des frontières Pour le moindre regard Ils te donnent leurs yeux Ils t'offrent leur sourire Comme entrée en matière Ce n'est pas le trottoir Non mais c'est sa banlieue Puis devant un lait-fraise Ils parlent comme en songes En trichant sur leur âge Ils s'inventent un destin Mais ils ne mentent pas Leur vie est un mensonge Et pour la traverser Ils n'ont qu'un jeans déteint Toi tu ne donnais jamais d'adresse Une fille qui faisait le tapin T'abritait ou bien un copain Pareil à toi dans la détresse Tu voulais vivre dans l'ivresse Au jour le jour, la nuit vivant Du feu sous tes semelles de vent Et jamais tu n'avais d'adresse
Et quoi qu'on ait juré De vivre en égoïste On laisse au vagabond Les clefs de sa maison On se trouve imprudent Mais trop tard les artistes Emménagent leurs T-shirts . Leurs jeans et leurs blousons Ils font tourner leurs disques Sur ton électrophone Ils font vivre les meubles Comme font les animaux Dés qu'ils ont l'oeil ouvert Ils sont au téléphone Appelant des mères lointaines Qu'ils rassurent d'un bon mot Alors pendant qu'ils prennent Des bains interminables On cherche à mieux savoir Qui sont ces va nus pieds On se trouve bourgeois On se trouve minable Mais on fouille leur blousons Et on lit leurs papiers
Toi tu avais bien trop d'adresses Du manque d'amis tu te plains Oui mais tes carnets en sont pleins Comme ceux des mecs à la redresse
Il y a des stars du show-business Des filles que tu n'aimas un jour Des petits dealers de Beaubourg Mêlés dans tes carnets d'adresses
Ils imprègnent ta vie D'un parfum d'aventure Et jouent avec la leur Tout comme au cerf-volant T'opposent à tes amis Et bousillent ta voiture Mais font du moindre geste Un acte étincelant Ils ont de grands projets Auxquels ils ne croient guère Ils sourient tristement Quand on leur dit demain Ils savent qu'ils se font A eux mêmes la guerre Et t'échappent en faisant Un signe de la main Puis rentrant au matin Après une nuit dingue Ils font couler l'eau Pour faire croire qu'ils s'en nettoient En plaisantant encore Ils enfoncent la seringue Et sans un mot d'adieu Ils viennent mourir chez toi
Maintenant tu as une adresse C'est dans l'allée des Coquelicots Là ou les pleurs n'ont pas d'échos Entre les cyprès qui se dressent Que les doigts d'un ange caressent Puisque les miens sont impuissants Ton long corps qui va pourrissant Couché à ta dernière adresse