Hey? Ca vous dirait de faire l'amour avec un corbeau?
Lorsque la nuit survient ma belle ténébreuse Je me change aussitôt en joli corbeau noir En joli corbeau bleu sous la lune moqueuse Qui m'offre sa lumière en guise de perchoir
Je survole l'ennui ô ce terrible ennui Qui vous accroche l'aile et vous flanque par terre Nonchalamment guidé mon ange ma folie Par ce vent licencieux qui pousse à l'adultère
Regarde moi danser danser ma déité Ne suis-je pas craquant dans mon habit de moire? Ce plumage flambant et savamment lustré Offre à ton âme impure un solide miroir
Et quand je me déploie, ces ailes de vestale Empruntent à la beauté son panache superbe Mais ne t'y trompe pas: Cette allure impériale Camouffle l'âpreté de rires plus acerbes Car
Tu sais comme moi que les oiseaux Ont le vague à l'âme Les corbeaux n'ont plus de larmes D'avoir trop pleuré
Si quand vient le soir bel oiseau Au gré du hasard un corbeau Te suit dans le noir Gare à te tourner C'est peut-être moi!
Au-dessus des trottoirs au-dessus des allées des rues pavées d'ennui Sur l'onde des boulevards le soir quand tu t'absentes je te suis Le long des quais brumeux des squares où tu t'enfonces chaque nuit Pareil à ces bêtes traquées qui cherchent
Je te suis mon amour aussi fus-je peiné Lorsque je découvris sous ta porte cochère Qu'un tout autre que moi t'en allait pavaner Un misérable humain, grand Dieu que c'est vulgaire
Tu sais ce bel oiseau au-dessus de ton lit Lorsque tu te soullais l'autre fois c'était moi Que n'ai-je eu le courage et le bec endurci De plonger dans ton coeur pour taire tes émois
Et qui d'autre sinon ton ange ta passion Manqua d'assassiner ton amant d'un coup d'aile C'eût été délicieux mais la compassion Vint absoudre en mon âme cet amour infidèle Car
Tu sais comme moi que les oiseaux Ont le vague à l'âme Les corbeaux n'ont même plus de larmes D'avoir trop pleuré
Si quand vient le soir bel oiseau Au gré du hasard un corbeau Te suit dans le noir Gare à te tourner C'est peut-être moi!
Tous les cocus du monde ma belle ténébreuse Chaque nuit se transforment en jolis corbeaux noirs Et vont fouillant le ciel d'une éternelle ronde Espérant survoler l'arbre du désespoir
Aussi quand vous verrez au milieu des trottoirs S'avancer gauchement le bel oiseau déchu Songez non sans pitié que derrière ce regard Se cachent les yeux frêles et mornes d'un cocu