Ell' fréquentait la rue Pigalle. Ell' sentait l'vice à bon marché. Elle était tout' noire de péchés Avec un pauvr' visage tout pâle. Pourtant, y avait dans l'fond d'ses yeux Comm' quequ' chos' de miraculeux Qui semblait mettre un peu d'ciel bleu Dans celui tout sale de Pigalle. Il lui avait dit : "Vous êt's belle." Et d'habitud', dans c'quartier-là, On dit jamais les chos's comm' ça Aux fill's qui font l'mêm' métier qu'elle Et comme ell' voulait s'confesser, Il la couvrait tout' de baisers, En lui disant : "Laiss' ton passé, Moi, j'vois qu'un' chos', c'est qu' tu es belle." Y a des imag's qui vous tracassent Et, quand ell' sortait avec lui, Depuis Barbès jusqu'à Clichy Son passé lui f'sait la grimace Et sur les trottoirs plein d'souv'nirs, Ell' voyait son amour s'flétrir, Alors, ell' lui d'manda d'partir, Et il l'emm'na vers Montparnasse. Ell' croyait r'commencer sa vie, Mais c'est lui qui s'mit à changer. Il la r'gardait tout étonné, Disant : "J'te croyais plus jolie, Ici, le jour t'éclair' de trop, On voit tes vic's à fleur de peau. Vaudrait p't'êtr' mieux qu' tu r'tourn's là-haut Et qu'on reprenn' chacun sa vie." Elle est r'tourné' dans son Pigalle. Y a plus personn' pour la r'pêcher. Elle a r'trouvée tous ses péchés, Ses coins d'ombre et ses trottoirs sales Mais quand ell' voit des amoureux Qui r'mont'nt la rue d'un air joyeux, Y a des larm's dans ses grands yeux bleus Qui coul'nt le long d'ses jou's tout's pâles.
Compositor: Paroles: Raymond Asso. Musique: L.Maitrier 1939