C'est une aventure bizarre. Comme le train quittait la gare, L'homme a bondi dans le couloir Et, le front contre la portière, Il regardait fuir la lumière De Paris mourant dans le soir. Un train dans la nuit vous emporte. Derrière soi, des amours mortes, Mais l'on voudrait aimer encor. La banlieue triste qui s'ennuie Défilait morne sous la pluie... Il regardait toujours dehors. Le train roulait dans la nuit sombre. L'homme, déjà, n'était qu'une ombre, Et d'être seule j'avais froid. S'il a parlé... qu'a-t-il pu dire ?... Je ne revois que son sourire Quand il vint s'asseoir près de moi. Un train dans la nuit vous emporte. Derrière soi, des amours mortes, Et dans le cœur un vague ennui. Alors sa main a pris la mienne, Et j'avais peur que le jour vienne... J'étais si bien tout contre lui. Lorsque je me suis éveillée Dans une gare ensoleillée, L'inconnu sautait sur le quai. Alors des hommes l'entourèrent Et, tête basse, ils l'emmenèrent. Tandis que le train repartait, J'ai regardé par la portière Comme en un geste de prière. L'homme vers moi tendait les mains. Le soleil redoublait ma peine Et faisait miroiter des chaînes... C'était peut-être un assassin. Il y a des gens bizarres Dans les trains et dans les gares.
Compositor: Paroles: Raymond Asso. Musique: R. Cloërec 1938