Elle pourrit là sur son trottoir Elle a des larmes plein les yeux Elle a dix-huit, vingt ans, à voir Jamais rien vu de si malheureux Elle a un manteau gris marmotte Des pompes à fermeture éclair Un col en fausse fourrure pâlotte Déglingué comme une serpillière La tristesse et l'ennui délavent Sa tronche et sa robe à carreaux Elle a la peau couleur de cave Et ses cheveux tombent comme des rideaux
Quand je passe devant, je l'entends dire D'une voix qui fait un bruit d'évier Que le fric est dur à obtenir Qu'elle paie trop cher pour son pucier Et que les hommes sont des ordures C'est pas parce qu'ils ont du pognon Qu'ils peuvent vous chier sur la figure Qu'ils peuvent vous balancer des gnons
J'aime mieux pas trop penser aux types Qui montent avec elle pour baiser Ils doivent être dans des drôles de trips Que y a qu'elle qui peut pas refuser J'aime mieux pas trop penser aux rêves Qu'elle fait quand elle veut s'en aller Ni au Jules qu'elle a, qu'elle en crève Qui se fout d'elle et la fait marner
Et sur nos monts, quand le soleil Annonce un brillant réveil Y a cette nana sur le trottoir Qu' aurait comme un petit coup de cafard Et sur nos monts, quand le soleil Annonce un brillant réveil Y a cette nana sur le bitume Remplie à ras bord d'amertume