L'univers grâce à la technique Ciné, radios, télévisions N'est plus qu'un bloc monolithique Sans chance aucune d'évasion Formalités, visas, frontières Peuvent bien disposer partout Pour nous embêter leurs barrières Les micros qui parlent, on s'en fout Avec le Niagara d'images Que déverse le cinéma Il fait un monde sans visage Neutre, grisaille, banal et plat Lavage intensif et ses drôles Injection mais à haute dose De vitriol et d'eau de rose Renaud Line et Gilbert Bécaud
Ainsi docilement mais en douce Grâce aux slogans des hauts-parleurs Comme roi dont l'esprit s'émousse Descend l'échelle des valeurs Nivellement systématique Voici venir l'homme-robot Sans réflexion ni sens critique Sans coeur, sans tripes ni cerveau Acceptant tout : même cuisine Même film, mêmes préjugés Mêmes habits, même doctrine Plus la peine de voyager Paris, Tokyo, San Francisco Mêmes bars, même limonade Même idéal, même salade Renaud Line et Gilbert Bécaud
Que reste-t-il du vrai folklore Coloré, vivant, émouvant ? Le ciné, les ondes sonores L'ont noyé sous leurs flots mouvants Pour le voyageur de passage Altéré d'authenticité Les producteurs très à la page Font du folklore à volonté France des vaches, Garde Républicaine Lauterbach, valet d'opéra Sarclo, Bühler, la coupe est pleine Servez chaud, folklore vaudois ! Mais que devient le flamenco Dans la péninsule ibérique A Granada sous les portiques ? Cette voix, c'est Gilbert Bécaud !
Ainsi va ce monde grisaille Ainsi le sel perd sa saveur Espagne, Ukraine ou Cornouailles Où sont donc vos fraîches couleurs ? La paysanne catalane Veut s'habiller comme à Paris Elle abandonne la sardane Pour danser le boogie-woogie Tout se vide et se banalise Un faux vernis anglo-saxon Ennuyeux comme une banquise Recouvre tout jusqu'aux chansons C'est ainsi qu'à tous les échos Exprimant l'idéal du monde On entend détonner les ondes Dans la nature à pleins tuyaux