Il est des lieux sur cette Terre Où l'on se sent vraiment chez soi La vie y semble plus légère On y est plus heureux qu'un roi Ce qu'ils offrent à votre vue Ce n'est pas un vaste horizon Mais tout simplement une rue Un peu de ciel sur des maisons Il en est un qui dans l'espace Est bien loin maintenant de moi Un café avec sa terrasse Et quand je veux je le revois
C'était dans un coin de Paris Un coin de Paris qui sourit Un café avec sa terrasse A Montparnasse C'est à l'enseigne des Lilas Des lilas il n'y en avait pas Mais le nom était resté là En souvenir, sans tralala Ce café - vous en souvient-il ? Avec son arôme subtil Faisait tenir tout le Brésil Dans votre tasse Le patron était alsacien Le garçon était vénitien Mais malgré tout ça c'était bien Un café parisien
J'aimais à l'heure apéritive M'y asseoir aux premiers beaux jours Pour embrasser la perspective De ce merveilleux carrefour J'y observais l'Observatoire Et Bullier, souvenir d'un bal Et le pavé chargé d'histoire Du boulevard de Port-Royal Un kiosque à journaux sans mystère Fleurissait sur le terre-plein Face à ce temple nécessaire Hommage au fameux Vespasien
C'était un café de Paris Entre mille joli, fleuri Avec son bar et sa terrasse A Montparnasse Au coeur de ce beau carrefour Où Saint-Michel et Luxembourg Avaient rendez-vous tour à tour Avec l'étude, avec l'amour On y rencontrait des acteurs Des poètes, des percepteurs Jamais, jamais de dictateur Uve d'espace (?) Et l'on fumait du Caporal Sous la statue d'un général Etait-il, je m'en souviens mal A pied ou à cheval ?
Le crépuscule sur la ville Traînait sa robe de lilas Un vieux monsieur lisait Virgile En dégustant un marsala De jeunes femmes odorantes Offraient leur visage cruel A cette lumière expirante Un reflet attardé du ciel Et des hommes avec ces femmes Echangeaient de subtils propos Sur l'immortalité de l'âme Ou le chic exquis d'un chapeau
C'était un café de Paris Une voix disait : "Mon chéri" L'amour aussi avait sa place A la terrasse On saluait des gens très bien Que l'autobus des Gobelins Vous déversait comme un trop plein Sur ce rond-point si cartésien Des amis venaient, excellents Hélas où sont-ils à présent ? Alors dans le jour finissant Du Val-de-Grâce Des frondaisons du Luxembourg Des vieilles pierres du faubourg Pour notre Paris de toujours Montait un chant d'amour
Il est venu de lourds soldats Qui ont écrasé tout cela Ah dites-nous qu'il reviendra Le beau temps des lilas !