J'habite un violoncelle, Un triangle isocèle. Je demeure dans une maison Entourée de gazon. Les filles les moins sages Viennent du voisinage. Sautant par-dessus le mur, Elles trouvent un homme mûr. Je vis dans une volière Dévoré par le lierre D'où l'on voit des oiseaux Qui planent sur les eaux. Je hante un couvent morne. Avez-vous vu mes cornes, Mon nez couvert de suie Car le diable je suis ? Non, non. Non, non : vous voulez nous faire peur. On ne vous croit pas, sacré farceur. La petite fée qui loge A deux pas de ma loge Vient d'être assassinée. Elle n'a plus de nez. Au fond d'un couloir vide, Je la retrouve vide En robe d'opéra, Dévorée par les rats. Elle fut toute ma vie. Longtemps, je l'ai suivie. Nous visitions tous deux Des pays merveilleux. Sans son profil de rose, Je perds le goût des choses Et je vous dis adieu Jusqu'à ce que je me sente mieux. Non, non : vous voulez nous faire peur. On ne vous croit pas, sacré farceur. Bien des histoires d'enfance Se terminent en cadence : Une ronde, une chanson Pour nous donner le frisson. Quand on évoque les plages Où la mer faisait rage Quand on pêchait le hareng Avec ses grands-parents Et quand, parfois, lucide, On se sentait le cœur vide Sur les bords du plaisir A deux pas du désir, On ne savait pas que ce charme Vous ferait verser des larmes Et que l'on devrait un jour Appeler ça l'amour. Bravo ! Vous avez bien du cœur. Vous êtes tout de même Un petit farceur.